Le bombardement du Yémen vu par mon ami (1)

Article : Le bombardement du Yémen vu par mon ami (1)
Crédit: © Mohamed Khaled pour Le Jeune Maghrébin
30 mars 2015

Le bombardement du Yémen vu par mon ami (1)

oie_2934910lW67XBDB

Mon ami Mohammed, l’un de ces 35 jeunes fondateurs du site Ayn Al Yemen (Oeil du Yémen), un journal électronique créé en 2011 dans l’intention de déchoir le régime de Ali Abdallah Saleh, est sidéré. Il ne comprend pas comment l’idée est venue au royaume d’Arabie saoudite avec l’appui de neuf autres pays arabes, de bombarder soudainement son pays, le Yémen.

Lors d’une discussion avec Mohammed, à la question s’il prévoit une offensive terrestre des forces de la coalition arabe contre les Houthis, il a répondu : « On ne peut plus prévoir ». Car il n’avait jamais pensé qu’un pays arabe allait mobiliser autant de forces contre son pays. Certes, mon ami est tout à fait contre l’idéologie des Houthis, les alliés de l’Iran et la bête noire des Saoudiens, mais il croit dur comme fer que les conséquences de la violence sont énormes. Il a ajouté que « l’intervention terrestre est fort probable », mais elle serait une aventure, étant donné que les forces arabes, chapeautées par l’Arabie saoudite, ne connaissent pas la géographie du Yémen.

Mon ami veut également avoir une idée sur la réaction des Marocains après la participation de mon pays à cette coalition arabe contre les Houthis. Et j’avoue que sa question m’a coupé un peu l’herbe sous le pied vu que je ne savais pas s’il est favorable ou non à la décision du royaume d’y rejoindre la coalition. En plus, rares sont ceux qui s’intéressent à la politique au Maroc. Et si un Marocain adhère à un parti politique, croyez-moi, c’est pour se faire un peu de fric ni plus ni moins.

F-16_block_52+_Royal_Moroccan_Air_Force
Avion de chasse marocaine

Durant la longue conversation avec lui, j’ai réalisé qu’il ne savait pas beaucoup de choses sur mon pays, le Maroc. Car le climat politique très tendu au Yémen ne laisse pas le temps à ces jeunes d’étendre leurs connaissances à d’autres pays, voire d’autres cultures. Pourtant, mon ami Mohammed ne cache pas son intérêt pour en savoir plus sur le royaume chérifien. Il m’a demandé de lui proposer des sites où il peut trouver des informations sur les événements culturels au Maroc. Le hic, c’est que la plupart des revues électroniques au Maroc ne s’intéressent qu’aux scandales politiques. Quant à la culture, elle est quasi absente des rubriques de la majorité des journaux et magazines marocains.

À dire vrai, moi aussi je ne sais pas grand-chose sur le Yémen. Même si « le contenu informatif sur le Yémen est abondant sur le Net » (pour reprendre les termes de mon interlocuteur). La faute à qui si on ne s’intéressait pas à d’autres cultures ? C’est la faute à nos médias. Nos chaînes fourmillent d’émissions de cuisine, pas de programmes qui nous font découvrir d’autres peuples et qui promeuvent l’image de notre pays. C’est honteux, non ?

«La lutte contre l’extrémisme en commettant des abus, c’est contre-productif»

Mais revenons à présent à nos moutons, au sujet du bombardement du Yémen qui continue, malgré la condamnation de plusieurs pays, dont l’Irak qui a goûté déjà toute l’amertume de la violence, de cette ingérence arabe au Yémen. De son côté, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a affirmé lors du sommet de la Ligue arabe en Egypte, le 28 mars 2015, que « la lutte contre l’extrémisme en commettant des abus n’est pas seulement une erreur, c’est contre-productif .» En effet, le même jour, Mohammed m’a assuré que la situation est plus que délétère dans son pays. Sur le terrain, les Houthis ont commis des massacres et des civils sont tombés à cause des erreurs de la part de la coalition arabe.

Peut-on parler d’une prochaine guerre civile au Yémen ? Notre ami répond oui, puisque tous les ingrédients d’une guerre civile sont réunis : on ne peut pas imaginer une maison sans armes dans ce pays. En effet, on parle de plus de 60 millions d’armes en circulation au Yémen, la moyenne de deux armes pour chaque individu. Et cette nouvelle guerre déclenchée par les Saoudiens est une aubaine pour les compatriotes de Mohammed pour récolter le maximum d’armes possible. Tout ceci dans le but de « faire face à une éventuelle intervention terrestre de la coalition arabe» dont le Maroc fait partie, ajoute notre ami. Selon Mohammed, des hôpitaux, ainsi que la seule station électrique à Sanaa ont été touchés par les bombardements samedi. Concernant les initiatives régionales et internationales pour régler le conflit, il paraît que notre ami est très favorable à une initiative proposée par le Liban.

Hier dimanche 29 mars, j’ai essayé de contacter mon ami pour savoir plus sur le bombardement qui a visé des cibles militaires des Houthis dans sa ville natale, mais en vain. Et j’avoue que cette absence de mon ami sur les réseaux sociaux m’intrigue. Est-ce que mon ami a été touché par une frappe de la coalition par hasard ? Ou est-ce tout simplement à cause d’une coupure d’électricité comme d’habitude ?

À suivre…

Partagez

Commentaires

Mahmoud
Répondre

Moi je pense tout simplement que ces bombardement sont une véritable agression, dont les résultats seront contre productives. S'ils ont peur de l'Iran ils n'ont qu'à le bombarder et laisser le Yémen en tranquillité.

Le Jeune Maghrébin
Répondre

Merci pour l’intérêt que vous portez à la souveraineté du Yémen. Gardez un œil sur notre blog ! Notre ami Mohammed a encore beaucoup de choses à vous raconter !