Le Jeune Maghrébin

Séisme au Maroc : Je me suis rendu à Asni, un village sinistré de l’Atlas

Huit jours après le séisme du 8 septembre, j ‘ai quitté Marrakech pour me rendre à Asni, un village berbère situé à 47 km au sud de la ville, au cœur de la province d’Al-Haouz. Sur la route, au fur et à mesure que l’on s’approche des montagnes de l’Atlas, les décombres de maisons en briques crues deviennent de plus en plus nombreuses, éparpillées ça et là. Des tentes jaunes, vertes et bleues sont dressées tout au long de la route. Ici, on est proche de l’épicentre du séisme, la situation paraît surréaliste, les dégâts sont partout, c’est dramatique.

Je suis arrivé à Asni vers midi. Dans cette commune rurale, la présence de l’armée est importante, c’est comme si le village, très durement frappé, était devenu du jour au lendemain une caserne militaire. C’est en effet ici que les forces armées marocaines ont choisi d’installer un imposant hôpital de campagne médico-chirurgical.

Un hôpital miliaire a été installé à Asni, un village au sud de Marrakech, pour s’occuper des victimes du séisme du 8 septembre. © Le Jeune Maghrébin

Le choix d’Asni n’est pas anodin. Cela est dû à son emplacement stratégique qui fait de lui un carrefour entre les villages du Haut Atlas et Marrakech. Mon ami Youssef est professeur et y travaille depuis des années, il se dit chanceux d’avoir quitté le village quelques heures avant le désastre meurtrier.

« Ce vendredi-là, j’ai quitté le village pour rendre visite à ma cousine, qui se trouve à Marrakech. Deux jours plus tard, je suis retourné au village, c’est là que je me suis rendu compte que ma maison avait été endommagée. On dirait qu’un missile l’a frappée. Heureusement, je n’y étais pas, sinon je ne serai pas là aujourd’hui. La chance a été de mon côté, Dieu merci. »

Abdelkrim, en revanche, lui, était présent à Asni au moment du séisme. Je l’ai rencontré non loin de l’hôpital militaire installé sur place. Il était assis, seul et à l’écart du monde. Il était encore sous le choc et avait l’air à la fois triste et calme. Il m’a montré de loin sa tente, plantée près de la route principale, une tente verte et de petite taille qui lui appartient. Les autres habitants, ont reçu des tentes, distribuées par le Croissant-Rouge marocain, de l’armée et surtout, des ONG.

Un camp a été mis en place à Asni, un village au sud de Marrakech, pour accueillir les sinistrés du séisme du 8 septembre. © Le Jeune Maghrébin

« Moi je n’ai rien reçu de personne, sauf de la nourriture et de l’eau pour survivre. Moi, je veux rien et je remercie Dieu car aucun malheur n’est arrivé à ma famille. J’espère que les autorités nous aideront à reconstruire notre logement. Ils ont annoncé à la télé qu’il y aurait bientôt des pluies torrentielles. Franchement, j’ai aucune idée de notre sort. Je suis très inquiet ! »

Asni s’est transformé en un village de tentes, où on a entassé des familles entières, sans électricité ni toilettes. Pas loin du camp de tentes, une foule attend les donations qui affluent vers le village. Des camions aux couleurs des drapeaux nationaux arrivent, chargés de toutes sortes de marchandises. Des ONG marocaines et étrangères sont elles aussi mobilisées. Et dans les villages les plus isolés, inaccessibles par la route, on recourt souvent aux mules pour acheminer les aides nécessaires aux villageois concernés.

Tente dans le village de Tinmel

Dans ces camps de fortune, la vie des sinistrés est extrêmement difficile. Certains enfants ont perdu leur famille, j’en ai vu qui mendiaient, à la recherche d’un peu d’argent. On a appris aux informations que des prédateurs rôdent dans les camps, profitant ainsi da la situation chaotique dans les villages les plus touchés. Ces prédateurs agissent aussi via les réseaux sociaux. Le gouvernement marocain a tout de suite réagi en mettant en place un numéro vert contre la traite d’êtres humains (Numéro vert = 080000 47 47). Par ailleurs, certains influenceurs opportunistes se mettent en avant en intervenant sur le dos des plus démunis dans le seul but d’obtenir plus de vues sur les réseaux sociaux, notamment sur TikTok. Leut objectif : faire du buzz pour gagner plus d’argent. Ces agissements sont évidemment à condamner et c’est là aussi de la responsabilité de l’État de réagir pour les réprouver.

Pour faire face à tout ce chaos, le manque de coordination entre les organisations de la société civile et l’État pose un réel problème. J’ai pu le constater en me rendant sur place. Tout le monde donne ce qu’il a et fait ce que bon lui semble, sans organisation, sans le moindre contrôle. Cela crée de gros déséquilibres, ainsi, certains villages ont bénéficié abondamment de denrées alimentaires, tandis que d’autres attendent toujours l’arrivée des bienfaiteurs pour venir à leur rescousse.


Le problème c’est que « l’Etat marocain n’a pas réagit à temps, car il ne dispose pas d’un plan de gestion de crises et de catastrophes naturelles », me confie Sokayna, marocaine qui travaille en tant que volontaire pour une ONG américaine. « Pour moi, l’élan de solidarité a sauvé la face au gouvernement. Sans cette solidarité, on aurait pu être la risée de la communauté internationale », ajoute-t-elle. « Aujourd’hui, je me demande vraiment quel est le rôle de l’État face à une telle catastrophe, si ce n’est intervenir au bon moment pour réconforter les citoyens dans la peine et le dénuement. Nous les Marocains, nous payons énormément de taxes, et dans ces moments on se demande à quoi ça sert… Après la catastrophe, dans les villages du Haut Atlas, l’arrivée des secours marocains a en effet semblée beaucoup trop tardive.

Notons cependant qu’Aziz Akhannouch, le chef du gouvernement marocain, a présidé la semaine dernière une réunion consacrée notamment à la reconstruction des logements détruits dans les zones sinistrées. « Les citoyens qui ont perdu leurs logement recevront des indemnités (…) une offre claire sera annoncée prochainement », a-t-il déclaré. Selon lui, des solutions sont actuellement à l’étude pour les personnes sans abri. Une lueur d’espoir pour ceux qui ont tout perdu.



Maroc : Un séisme dévastateur

Un puissant séisme, de magnitude 7 sur l’échelle de Richter, a frappé le centre de mon pays bien-aimé, le Maroc, dans la nuit du vendredi 8 septembre à 23h11 (heure locale), provoquant des pertes humaines colossales. Moi aussi, j’aurai pu ne plus être là.

« Un séisme de magnitude 7 frappe des régions du Maroc », a annoncé la chaîne qatarie Al Jazeera. Quelques secondes ont suffi pour que l’information soit relayée par les médias locaux. L’agence de presse officielle, la MAP, quant à elle, a tardé à confirmer la survenue d’une secousse sismique inédite et ce, au moment où les Marocains ont été pris de terreur et couraient en tous sens comme des fous. D’où la nécessité de libérer les médias de service public du joug de l’État, puisqu’ils ne remplissent pas leur devoir d’information vis-à-vis des contribuables, la preuve en est.

Cette soirée meurtrière du 8 décembre 2023 restera longtemps gravée dans la mémoire de tous les Marocains. Partout au royaume, c’était la panique, nous avons tous vécu un moment de profonde angoisse. Personnellement, j’ai vu ma maison bouger, comme on le voit dans les films… jamais je n’aurai pensé vivre un jour cette terrible expérience. J’ai vu la mort en face ! Quant à mon amie, qui vit dans le centre de Marrakech, elle dit qu’elle a été terriblement traumatisée et, du coup, elle ne peut plus rentrer chez elle, de peur que sa maison s’écroule. Actuellement, les gens ont encore peur, ils craignent des répliques. Ceux qui préfèrent passer la nuit dans la rue sont légion, car ils estiment que le froid est mille fois plus clément que de périr, comme ça, en 30 secondes.

Ce qui est certain, c’est que la terre a tremblé extrêmement fort, sans nous prévenir, causant la mort de plus de 2800 de citoyens lambdas, des citoyens qui vivent au quotidien dans des conditions misérables dans des villages isolés et méconnus pour beaucoup d’entre nous.

En plus du bilan humain très lourd, des villages entiers ont été rayés de la carte dans la région de Marrakech, dont fait partie la province d’Al-Haouz, dans la région du Haut Atlas, où se situait l’épicentre du séisme. Et vu l’ampleur du nombre de maisons ravagées par le tremblement de terre, je doute que nous puissions tout reconstruire dans un délai très court, tout en respectant cette fois-ci les normes parasismiques. Car, comme le rappelle l’ONG Global Earthquake Model (GEM) Foundation : « On ne meurt pas d’un tremblement de terre, mais de l’effondrement des bâtiments qu’il provoque. Il vaut mieux prévenir qu’ensevelir”.

Dans un article consacré à l’événement meurtrier qui a fait des ravages au royaume chérifien, le Sunday Times écrit, à propos du sinistre : « Il est survenu avec une force de 30 bombes atomiques mais dans des pays du monde plus prospères – et mieux préparés – ce tremblement de terre n’aurait pas été meurtrier. »

Zone du séisme au Maroc, le 9 septembre 2023. © https://earthquake.usgs.gov/


Ce désastre naturel a montré combien nous étions mal préparés pour une telle catastrophe et, malheureusement, nous n’avons rien appris des tremblements de terre précédents, notamment le séisme d’Agadir, en 1960, qui a fait près de 12 000 morts (un tiers de la population de la ville d’alors avait péri). Aurait-on pu éviter le pire ? Oui, je crois que c’est possible, si nous avions investi dans la recherche scientifique, l’éducation aux séismes et surtout, la construction de bâtiments solides, adaptés, capables de limiter les risques sismiques.

Les dégâts dans le village d’Imi N’Tala, près d’Amizmiz, dans la province d’Al-Haouz, au pied des montagnes du Haut Atlas. ©alyaoum24, via Wikimedia commons.

Ce qui m’attriste le plus, ce n’est pas le séisme en soi. Il y a toujours eu des catastrophes naturelles, et il y en aura toujours… ce qui m’attriste, c’est de constater la réaction trop lente des autorités. Certes, les forces armées et les sapeurs-pompiers sont intervenues quelques heures après le séisme. Pourtant, il était évident que le gouvernement n’avait pas anticipé, il n’avait pas élaboré de plan d’action pour faire face aux effets d’éventuels sinistres. Le mal est déjà fait, mais il faut absolument y penser et se préparer à gérer des situations de telle ampleur. Parfois, je me demande à quoi sert d’avoir des dirigeants incapables de prendre rapidement les bonnes décisions.

Je me demande également comment serait mon pays sans la solidarité de ses citoyens, qui subissent déjà l’effet d’une inflation excessive, sans oublier que le Maroc est considéré parmi les pays où la corruption bat son plein, dans la mesure où il a été classé au 94ème rang sur 180 pays pour l’année 2022 par Transparency International.

Des Marocains et étrangers qui font la queue pour donner leur sang aux blessés, cela me fait chaud au cœur. Mais lorsqu’il s’agit d’une crise humanitaire, l’appui de la communauté internationale est crucial. Effectivement, le gouvernement marocain a annoncé avoir accepté l’aide de quatre pays « amis » : Espagne, Grande-Bretagne, Qatar et Émirats arabes unis. Ils vont venir en renfort des secouristes nationaux débordés par les victimes du séisme.

À Paris, des équipes de l’ONG française « Secouristes sans frontières » disent attendre le feu vert de Rabat afin de pouvoir participer aux opérations de secours dans les zones sinistrées à Marrakech. Bien entendu, s’ils se rendent au Maroc, ils ne partiront pas les mains vides, mais avec « une caméra et du matériel d’écoute pour détecter les victimes sous les décombres », comme l’a expliqué ce dimanche Arnaud Fraisse, le fondateur de l’association, sur France Inter. Mais le feu vert du Maroc à l’aide de la France se fait longuement attendre…

Comme d’habitude, le Maroc fait-il du chantage à la France ? Il n’y a aucun doute là-dessus car, à ma connaissance, nous avons des besoins considérables en secouristes et en matériel. C’est urgent !

De toute façon, la page de ce séisme sera tournée tôt ou tard, mais j’ai un souhait pour l’avenir de mon pays : le Maroc doit être prêt au pire, car une catastrophe naturelle a le privilège de frapper, n’importe où et n’importe quand.

Comprenne qui voudra !


Le foot peut-il rapprocher les Algériens et les Marocains ?

Samedi dernier, l’équipe nationale marocaine a affronté son homologue algérienne en quart de finale de la Coupe Arabe qui se déroule actuellement au Qatar. Et sans surprise, le match a été bel et bien politisé.

Un match de foot ou une guerre ?

Pour certains citoyens avertis ici au Maroc et là-bas en Algérie, ce match est tout simplement une rencontre sportive qui n’a rien d’extraordinaire. D’autres, en revanche, y compris les généraux qui gouvernent l’Algérie d’une main de fer, ont saisi cet événement purement sportif pour régler leurs comptes avec le régime marocain et notamment, lorsque ce dernier a osé, en décembre 2020, normaliser ses relations diplomatiques avec un autre pays ennemi des militaires algériens, à savoir Israël.

Soyons honnêtes, les responsables marocains n’ont pas raté cette opportunité pour mettre de l’huile sur le feu et, ainsi, envenimer davantage les relations entre les deux peuples frères. Le président de la fédération marocaine de football, par exemple, s’est rendu au terrain d’entraînement quelques heures avant la rencontre tant attendue entre les deux équipes voisines. Et la fédération dont il est président, a même promis une prime de 500 000 dhs aux joueurs s’ils réussissent à battre les Algériens.

En lisant quelques couvertures des médias algériens de la rencontre de samedi, j’ai parfois l’impression qu’il s’agit d’une guerre et non pas d’un simple match de football. En effet, ils se sont réjouis de la « domination  » algérienne des Marocains à Doha. D’autres, pousseront le bouchon plus loin en qualifiant la défaite de notre équipe nationale d’une gifle pour le Makhzen (le régime marocain), cet allié des sionistes et, ce voisin hostile, qui cherche à exploiter – pour des agendas politiques – une rencontre footballistique.

Le foot peut-il promouvoir la tolérance ?

Heureusement, ni les joueurs ni les supporters sont tombés dans le piège des va-t-en-guerre. Ils ont joué avec fair-play et ce, dans une atmosphère de tolérance, qui n’a rien à voir avec l’image belliqueuse véhiculée à travers les médias sociaux. Certes, nous avons énormément de points de divergence, mais aux moins le foot a rapproché entre nos deux nations ayant un destin commun.

Personnellement, j’ai regardé le match dans un café et, sincèrement, j’étais surpris par le nombre considérable d’individus qui ont afflué dans les cafés pour suivre cette rencontre. Ce qui est bizarre, c’est qu’il y avait également, parmi la foule, des gens qui n’avaient jamais de leur vie suivi un seul match. Ils espéraient se réjouir d’un éventuel fiasco de l’autre camp.

Pour moi, l’essentiel, c’est que les joueurs, au stade, aient été tolérants tout au long du jeu, les uns envers les autres et, du coup, j’aimerais bien savoir ce qui empêche les citoyens de faire de même un jour et tourner enfin la page de ce passé douloureux, qui freine la croissance économique des peuples de notre région.

Franchement, ça m’attriste quand un Marocain ou un Algérien commence à proférer des insultes à l’égard de ses voisins. Nous devons, au contraire, promouvoir la solidarité. Personnellement, malgré le fait que j’ai grandi au Maroc, je me sens souvent plus algérien que marocain.

Je félicite les Algériens qui méritent largement leur victoire. Je souhaite également à nos joueurs bien du succès dans leurs futurs matchs.


Maroc : Miss Roses cible des racistes

Au mois d’avril, une jeune berbère (amazighe) « brune » a été élue « Reine des roses » à Kelaat Mgouna. Cette ville, située au sud-est du Maroc, abrite chaque année le festival des roses. Mais cette année, l’élection a été secouée par de nombreuses réactions racistes sur le net.

Soukaina Amzil, 23 ans, issue d’une famille berbère modeste, a été la cible d’une vague d’attaques racistes sur les réseaux sociaux dans mon pays, le Maroc. Ces réactions prouvent que le racisme existe bel et bien au royaume chérifien. La raison ? La couleur de la peau de la « Reine des roses » 2019 qui ne plaît pas à certaines personnes… Il faut savoir que cette compétition, qui élit chaque année une jeune fille de la région « Miss Roses », était dominée depuis sa création (il y a 57 ans) par des femmes « blanches ».

En faisant un tel choix, les organisateurs voulaient peut-être envoyer un message de tolérance et casser les codes de sélection de la Reine des roses. Ils voulaient peut-être tout simplement dire que les mentalités sont censées évoluer et qu’une jeune femme à la peau un peu plus « brune » mérite, elle-aussi, de remporter le prestigieux concours, surtout quand elle répond à tous les critères requis (ou au moins à un grand nombre).

https://www.facebook.com/100000065182606/posts/2465013786844103/?app=fbl

À vrai dire, les organisateurs ne se basent pas uniquement sur le critère de la beauté extérieure pour déterminer qui sera la gagnante parmi une dizaine de candidates. D’autres critères rentrent en comptent parmi lesquels la culture générale, la cueillette des roses etc.

Pourtant, des pages Facebook se sont demandées si Soukaina méritait vraiment d’être nommée Miss Roses. Ces réactions ont été considérées par des activistes marocains comme une atteinte à la dignité de la jeune fille et une menace grave à l’égalité des chances. Cela révèle qu’il y a encore des poches de résistance marocaines au changement des mentalités. Heureusement, car la lutte contre le racisme et la discrimination, c’est notre devoir en tant que citoyens assoiffés d’égalité, de liberté et de démocratie.

Soukaina, c’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, car le racisme est malheureusement encore bien encré dans la société marocaine. La question que l’on doit se poser est la suivante : le temps n’est-il pas venu de repenser nos comportements racistes ? Qu’est-ce qui explique de tels comportements ? Pourquoi en est-on encore là aujourd’hui ? Si nous ne nous posons pas de questions, la société marocaine risquerait d’être à la traîne par rapport à d’autres sociétés qui avancent vers plus d’égalité et plus de démocratie…


Le royaume chérifien, le pays qui a déçu tout le monde


J’ai grandi dans le Maroc dit « inutile », celui des montagnes et de l’isolement. Dieu sait combien la vie est dure là-bas ! En tout cas, nous nous sommes habitués à ce mode de vie, comme nos ancêtres l’ont fait avant nous. Parfois, je me demande s’il n’est pas injuste de voir le jour dans l’une des régions les plus marginalisées du royaume chérifien, une région qui n’a rien à envier au Rif, où la population appelle depuis 7 mois à la justice sociale .

Nos religieux prêchent jour et nuit que celui qui s’indigne à propos de son destin et qui s’indigne aussi contre l’injustice est un mécréant. La raison ? Vivre dans le besoin est un test créé par le divin. Et ils ajoutent que d’autres nations nous envient, nous les Marocains, car la sécurité règne dans notre pays. C’est pourquoi ils nous invitent constamment à prendre des leçons de la situation tragique en Syrie et en Irak par exemple. Pour nos religieux, qui sont  désormais des fonctionnaires publics à part entière, la quiétude n’a pas de prix. Ils disent en outre que le Maroc est l’un des rares pays où le pain est peu cher.

Certes, nous n’avons pas intérêt à l’effondrement de notre patrie et nous ne voulons pas non plus de chaos. Mais n’avons nous pas le droit de savoir pourquoi un pays qui déploie des hôpitaux militaires à l’étranger n’arrive pas à soigner ses propres citoyens ?  Le décès tragique de la fille Idya, en avril dernier, témoigne d’une situation anormale. Cette enfant est morte à cause du manque de matériel dans l’hôpital le plus proche de son village, qui se trouve à 500 km de là…

Au royaume chérifien, le « makhzen » qualifie les militants descendant dans les rues pour dénoncer la hogra de « séparatistes », voire de « semeurs de zizanie ». L’objectif : justifier le recours à la répression à leur égard et, du coup, étouffer la contestation qui agite la région du Rif. La situation est en effet tendue depuis la mort de Mouhcine Fikri, un vendeur de poisson écrasé dans une benne à ordures le 28 octobre 2016, sous les yeux des autorités.

 

Aujourd’hui le pays a retrouvé son calme après une série de manifestations pacifiques, dispersées sans ménagement, en plein ramadan, et perturbées par des baltagia (violeurs). Des militants et des blogueurs ont été arrêtés. Le pire, c’est que la justice marocaine a prononcé des sentences lourdes à l’encontre de plusieurs de ces détenus en un temps record. On peut dire que le soi-disant modèle démocratique marocain a montré son échec. La police a humilié les citoyens lors des contestations qui ont eu lieu dans plusieurs villes.

Les médias officiels, qui sont financés par l’argent des contribuables marocains, et qui sont censés défendre leurs causes, n’ont ménagé aucun effort pour diaboliser les activistes en leur accolant de fausses accusations. Par exemple, ils ont accusé à tort le leader du mouvement de contestation au Rif (le Hirak), Nasser Zafzafi, d’avoir reçu de laide de l’Iran. Autant d’allégations qui ont servi de prétextes pour mener une campagne d’arrestations massive.

L’arrestation de l’activiste Zafzafi et de ses camarades, au lieu de chercher des solutions aux revendications légitimes des citoyens, a fait montre du retard démocratique du Maroc, ce pays qui méprise encore ses citoyens. Autre contradiction, comment peut-on expliquer l’envoi d’avions chargés de produits alimentaires depuis le royaume vers le pays le plus riche du Golfe, le Qatar, au moment où nos compatriotes crient famine dans les montagnes ?

Où va le Maroc ?

Le constat est amer : cela va de mal en pis. Mais, Dieu merci, les forces vives du pays sont déterminées plus que jamais à militer corps et âme pour implémenter un vrai modèle démocratique au Maroc, ce pays où l’injustice bat son plein et qui va droit dans le mur.

 

Le makhzen et la démocratie sont incompatibles.